Devant le Laboratoire

Kaoren
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Kaoren
Sam 1 Fév - 10:30
« Kaoren. »

Si la façon dont il devrait s’appeler demeure incertaine à ses yeux, il n’attache pas autant d’importance à celle dont les autres l’appelleront. C’est sans sourciller ni bégayer sur un phonème qu’il parvient à énoncer son nom de toujours, la tête haute comme ne s’adressant qu’à son interlocutrice la plus "humaine".

Le caractère prosaïque de sa situation s’est réinstallé progressivement durant le discours de cette dernière. Le Laboratoire, l’exploration, la fuite devant un ennemi déposé là par le mauvais vouloir de l’Esquisse ; les mêmes préoccupations qu’avait encaissées Kaoren au soir du jour précédent. Et puis la sagesse de considérer les événements, d’anticiper les conséquences et de concevoir le mode opératoire pour la suite, tout ce à quoi on le prépare depuis lors. La joute contre le Ciel n’a déjà plus rien de chevaleresque, ni même de romantique. C’est à peine s’il y subsiste une part de symbolisme. En vérité, c’est probablement tout cela que Kaoren tentait de fuir en se réfugiant derrière le coin du bâtiment.

Sans doute devrait-il s’en préoccuper plutôt.

Il devra retourner confronter les Cyantifiques, il les en a assurés et l’a certainement juré aux mânes qui le hantent. Mais il n’est pas encore totalement sain, pas plus qu’il n’est fou. Il est venu chercher le conseil de son reflet illusoire, et l’Esquisse a eu le culot de ne lui présenter qu’une autre claque de son absurde réalité. À chaque occasion, ses attentes le déçoivent. Kaoren regarde à sa droite, une énième fois, pour vérifier dans les yeux plaqués sur le cuivre s’il veut se sentir seul, et la réponse lui vient avant même qu’il n’ait terminé son mouvement de tête.

« Puisque vous vous êtes retrouvés sains et saufs, pas besoin de vous presser. Vous pouvez passer prévenir les Cyantifiques, ils sont en train de se rassembler dans la salle de réunion pour parler de… »

De toutes ces choses dont il n’a qu’une envie lointaine et profonde de parler. De survie, d’entraide, de planification, de contentieux et des dernières lubies de l’Esquisse.

« Des seules choses dont on parle en ce moment. »

C’est la dernière concession de Kaoren à son pragmatisme. Tenir sa fausse promesse d’aller chercher quelqu’un pour participer à la réunion, contribuer à quelque effort communautaire, et mettre un point final à tout cet enchaînement de conversations qui lui paraissent toujours plus insensées. Trouver un instant de répit, sans personne qu’il ne chérisse à qui rendre des comptes ; sans même l’Esquisse pour le juger de tout là-haut.

Il veut être seul avec ceux qu’il aime, quand l’Esquisse le laissera-t-il enfin seul !?

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Stilgar
Mer 5 Fév - 17:57
     Kaoren. Coréen ? Non.
     Il ne semblait en tout cas pas très décidé à la suivre. C’était embêtant. Pouvait-elle décemment laisser seule un enfant derrière dans un environnement hostile ? Et pouvait-elle décemment l’emmener dans un autre environnement hostile ? D’un autre côté, si les cyantifiques s’y dirigeaient, ils auraient un moyen de combattre toute menace. N’est-ce pas ? On était chez eux, tout de même.
     « Soit. Ne vous éloignez pas trop, jeune homme. Je pense que vous êtes assez grand pour comprendre cela. Et j’aimerais que vous nous rejoignez dès que possible, le principe d’une réunion, c’est de se réunir. Que vous souhaitiez participer aux discussions ou non, vous devez vous en tenir informé. »
     Et sur ce, elle se dirigea vers l’entrée, adressant à Stirling un « Venez mon petit. » et s’adaptant à son rythme. Elle ne pouvait pas trimballer sa mallette, son marteau et ce petit être, et utiliser le deuxième en cas d’urgence. Et il serait probablement malséant de lui proposer de partager un espace exiguë avec ses contrats de vente d’armes.



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Pazou
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Mer 5 Fév - 22:20


Il y avait eu plusieurs voix. Et pourtant, quand Mérovée passa le coin du bâtiment, il ne tomba que sur une femme. Seule. Sa peau était fonçée comme celle de ces hommes du sud qui venaient jusqu'à Rome. Mais au moins avait-elle l'air humaine. S’efforçant de ne pas paraitre menaçant, il avança les mains devant lui, paumes tournées vers la femme. Sa voix était rauque mais posée.

- Salutation, je suis Mérovée. Je cherche à quitter ces lieux, fe….

Abruptement, le guerrier se tut alors qu’il repérait enfin la Chose qui se tenait derrière la femme. La douleur minait son attention, ce qui expliquait qu’il n’ait pas réagi plus vite à la présence étrange et contre-nature de l’Objet. Mais maintenant qu’il l’avait repéré, il ne laisserait pas une autre de ces viles créatures s’en prendre à qui que ce soit, surtout pas une femme !

Porté par son courage et l’adrénaline, Mérovée se mit à courir droit sur l'Objet, ne se laissant pas dupé par son aspect traîtreusement inoffensif, sa spatha maintenant dégainée. Il cria.

- Arrière, femme ! Ecartes-toi !


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Folie d'Esquisse
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Jeu 6 Fév - 11:23
Alors que le grand chevelu se jette sur lui dans une véhémence à l’en croire ivre ou dément, le petit Stirling adopte un mouvement de panique, mais pas exactement celui que l’on pourrait attendre d’une créature menacée par une brute de trente fois sa taille. S’il essaie effectivement de s’écarter de sa trajectoire, ce n’est manifestement pas dans l’intention de le fuir, plutôt de lui céder le passage. Comme s’il avait simplement peur de se mettre en travers de sa route. De fait, l’incompréhension et la panique semblent décupler chez le petit Objet lorsqu’il constate que le guerrier poursuit toujours dans sa direction, et à force de chercher à se décaler dans tous les sens possibles, totalement incapable de comprendre vers où diable cet homme cherche à se rendre, il finit par perdre l’équilibre de sa roue sur le sable et s’effondre par terre avant même que le contact ait eu lieu.

Dans une scène pathétique à souhait, très similaire à la première rencontre entre Rosalina et Stirling, ce dernier essaie de nouveau de s’agiter dans tous les sens pour se relever, vainement hélas, et finit par déclamer aussi vite que ses mécanismes le lui permettent :

« Pardon ! Souci ! Degrés ! Liberté ! »
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Stilgar
Jeu 6 Fév - 16:35
     « Ah ! Vous m’avez fait peu— »
     Et voilà qu’un quidam déboulait de la plaine, l’air perdu, sensiblement comme elle quelques dizaines de minutes plus tôt, à ceci près que lui avait une épée au côté, et non une simple mallette. Même dans ce monde, on n’y venait pas tous avec les mêmes attributs en main.
     Le nom ne lui évoqua rien, il aurait fallu pour cela qu’elle fouille dans sa mémoire ce qu’elle avait appris sur l’histoire européenne, il y avait presque quinze ans de cela. Par contre, son épée bien plus, déjà par le fait qu’elle était sensiblement la même que celle portée par le légionnaire, et parce qu’en tant que connaisseuse des armes du monde et des temps anciens, elle savait différencier un glaive d’une épée.
     Par contre, voilà qu’il lui coupa la parole et se mit à courir dans sa direction, le fer au clair. Son premier réflexe fut de lâcher sa mallette et de saisir son marteau-cuiller à deux mains, et de se mettre entre Stirling et ce dangereux personnage, et elle eut du mal à décider de faire autrement quand il déclara qui était sa cible. D’autant plus que le petit Stirling était tout apeuré. Il n’était pas irréaliste en soi qu’elle vainque en combat singulier ce Mérovée, ceinture noire de taekwondo qu’elle était, mais bien plus qu’elle parvienne à le calmer.
     Oh, on est calme quand on est assommé.
     Singeant le fait qu’elle était de son côté, Rosalina baissa son arme, fit un pas de côté… et alors que Mérovée passait juste à sa droite, elle décocha un coup du tranchant de la main sur son cou, son bras décrivant un arc de cercle, comme la cuiller d’une catapulte, s’abattant sur son adversaire, ainsi qu,il était coutume de faire dans son art martial.



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Jeu 6 Fév - 23:57

L’objet qu’il poursuivait était petit et paraissait malhabile, pourtant il était parvenu à éviter jusque là les attaques de Mérovée. Quelques secondes, quelques esquives, et celui-ci commençait déjà à perdre patience. Encore un peu et il se sentirait franchement ridicule, un sentiment qu'il supportait difficilement, surtout en présence d’une femme !

Heureusement l’objet finit par trébucher. Sourd à tout ce qui viendrait de l’ennemi tant qu’il ne serait pas hors d’état de nuire, Mérovée s’apprêtait à frapper à nouveau quand son attention fut détournée par un mouvement dans la périphérie de son champ de vision. Là où se tenait la femme. Mérovée ne compris que ce mouvement était une attaque contre lui qu’au moment où quelque chose de dur frappa l’arrière de son crâne, le mettant à genoux et lui faisant voir des étoiles. S’il avait considéré la femme comme une menace, il aurait peut-être pu esquiver. Mais qui prendrait une femme pour une menace ? Et par les dieux, pourquoi l’attaquerait-elle alors qu’il se battait pour la défendre ?

Mérovée se força à respirer et serra les dents pour ne pas tourner de l’œil. A quatre pattes sur le sol, il n’avait plus grand-chose de digne mais s’évanouir serait vraiment trop pénible pour son ego. Parler fut également difficile, mais certaines choses nécessitaient d’être éclaircies :

- Es-tu folle, femme ? Comment as-tu osé me frapper ??

Une autre respiration douloureuse. Sa voix lui paraissait venir de l’autre bout d’un très long cor, mais il persista.

- Ce lieu est dangereux. Cette chose -il pointa vaguement l’Objet- est dangereuse. Et pour ce que j’en ai vu depuis mon arrivée, je suis le seul homme présent ici. Tu ferais bien de t’en souvenir la prochaine fois que tu paniques, par les dieux !


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Ven 7 Fév - 23:36
     … Quoi ?
     Enfin qu’importe, le résultat escompté avait été produit. Rosalina put souffler, poser son marteau, et attraper le pauvre petit Stirling, tout déboussolé, le tenant comme on le ferait d’un bébé dans ses bras – pas qu’elle savait comment on procédait, loin de là, mais disons que cela y ressemblait à peu près.
     « Ça va aller, mon petit, vous n’avez plus rien à craindre. »
     Il restait l’Occidental à l’expression aussi archaïque que l’était son armement. Elle devait être tombée sur un fou. Ce serait trop long de tout lui expliquer, et il risquait de ne pas comprendre. Les fous n’aiment pas qu’on leur rappelle qu’ils le sont – vu que pour eux, ils sont parfaitement sains, ce sont tous les autres qui sont fous. Autant entrer dans son jeu.
     « Je ne connais pas tes dieux, mais aucun des miens ne préconise qu’il faille attaquer des créatures inoffensives. »
     Enfin, c’est beaucoup dire, pour une athée. Et une vendeuse d’armes.
     « Stirling, car c’est le nom de celui que tu as pris pour cible, est mon compagnon et mon ami. Son apparence est singulière, je le reconnais, mais considère la mienne. »
     Pari un petit peu risqué : si comme l’image d’Épinal du fou se prenant pour Napoléon, ce quidam se prenait pour un ressortissant de, allez savoir quelle peuplade barbare polythéiste européenne, il ne devait jamais avoir vu de Noirs.
     « Pourtant, tu m’as reconnu comme humaine au premier coup d’œil. Il ne faut pas s’arrêter aux apparences, dans ce monde. Ce qui paraît inoffensif peut être agressif, (elle en était le plus parfait exemple, mais se garda de le soulever) et l’inverse est aussi vrai. »
     Déplaçant légèrement Stirling pour qu’elle puisse se libérer un bras, Rosalina tendit sa main vers l’homme.
     « Viens avec moi. Je ne suis pas ici depuis longtemps, mais je connais des personnes qui pourront te renseigner sur la nature de cet endroit mieux que je ne le pourrais. Nous avons un but commun : sortir d’ici. Accomplissons-le ensemble. Oh, et je m’appelle Rosalina Ngwenya. Mademoiselle Ngwenya. »



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Dim 9 Fév - 22:50

Le ton de la femme était vraiment très désagréable. Pour qui le prenait-elle ? Elle lui parlait comme à un enfant ! N’avait-elle aucune notion du respect qu’elle devait à un homme ? Et encore plus à un roi ? Elle en savait visiblement plus que lui sur cet endroit, mais il réfutait ses conclusions ! Il était évident qu’elle était humaine – bien qu’originaire du bout du monde connu – alors que son « ami » ne l’était pas. On ne lui enlèverait pas de la tête que faire confiance à ces créatures-objets était une erreur !

En serrant les dents pour bloquer la douleur, Mérovée se releva, ignorant la main tendue.

- Rosalina. C’était un nom étrange, mais il ne manquait pas de beauté. Mérovée se tut le temps que l'attention de son auditoire se concentre entièrement sur lui. Il ne se répèterait pas. Je suis Mérovée, roi des Francs, seigneur de Salie. Je ne rends de compte que devant les dieux. A ce titre, toute créature sous le ciel, fut-il mauve, me doit le respect. Si tu me parles encore une fois sur ce ton, femme, je te jure que tu le regretteras.

Il se tenait dressé en face de Rosalina (et de Stirling), sa carrure impressionnante masquant le soleil, incarnation de la puissance virile malgré son bras blessé. Celui-ci était toujours ramené contre son ventre, rendant pour la première fois sa blessure visible à Rosalina bien que lui-même fit tous les efforts du monde pour les ignorer, elle et la douleur.

- Mais j’ai conscience que les circonstances sont exceptionnelles. Il jeta un coup d’œil peu amène à Stirling mais resta immobile. Attaquer maintenant n'amènerait rien. Sa voix s’adoucit, subtilement plus suave. Tu as raison, l’important est de quitter cet endroit, et unis nous serons plus fort. Mène-moi à ces hommes.

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Folie d'Esquisse
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Sam 15 Fév - 17:56
Tout ce micmac n’était manifestement pas dans les habitudes de Stirling. S’il donnait déjà l’air d’un enfant découvrant quelque pays imaginaire à sa sortie du Laboratoire, il semble désormais plus déboussolé que jamais. Il tourne son piston dans tous les sens, et hésite une douzaine d’actions pour finalement toutes les avorter. Quelques vapes de sa fumée bleue viennent tenter d’interrompre la conversation, mais toutes s’en retournent dans leur réservoir sans avoir compressé mot.

C’est seulement après que Mérovée a marqué une énième pause, suffisamment longue pour laisser penser à une fin de conversation, que le petit engin se décide enfin à prononcer quelque chose d’audible :

« Pardon. Dois pas. Déranger. Cyantifiques. »

Il effectue un demi tour de roue dans le vide aussitôt qu’il a captivé l’attention des deux protagonistes en présence, puis agite son piston à pleine fréquence pour essayer de parler le plus rapidement possible, donnant au tout un ton plus aigu qu’à l’accoutumée :

« Mais. Personne ici. Partis. Surveille seul. En attendant. Liberté. »

Certains mots s’enchaînent assez fluidement, mais s’accompagnent le plus souvent d’un grincement en arrière-plan. Stirling n’est manifestement pas commode avec l’idée d’aligner ses mots deux par deux, et il est difficile à dire si c’est dans son empressement ou par quelque autre raison plus obscure qu’il s’est essayé à l’exercice. Mais sitôt son mot de conclusion rituel prononcé, il rapatrie sa fumée à toute vitesse et se laisse tomber sur l'avant-bras de Rosalina. Il est clair que ce genre d’effort n’est pas ou plus dans ses habitudes.
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Sam 15 Fév - 18:11
     Ce n’était donc pas qu’une blague, cette histoire de fous se prenant pour Napoléon.
     Oh, après tout.
     « Roi Mérovée, vous ne vous inclinez devant aucun homme, et vous avez bien raison. Sachez que si vous n’avez pas à ployer le genou en ma présence, je n’ai pas non plus à le faire, car je suis la reine-sorcière du lointain royaume de Mozambique – si on considérait le taux de corruption de Maputo qu’elle avait prodigieusement aidé à augmenter, ce n’était pas totalement faux –, le roi des rois d’Afrique – un titre que Mouammar Khadafi s’était arrogé – fut mon client, ainsi que le roi de l’étoile du matin – tel était le surnom donné à Kim Jong-un par sa mère –, le tsar de toutes les Russies et l’empereur ours jaune de Chine me comptent parmi leurs amis personnels – Rosalina n’avait certes jamais rencontré Vladimir Poutine et Xi Jinping en personne, mais enfin –, et il n’est pas un sahib, pas un wali, pas un nabab, pas un caïd, pas un émir, pas un sultan, pas un calife, du Ponant au Couchant, qui n’aie un jour tenté de me courtiser pour que je lui porte assistance – poétique manière de dire qu’elle avait vendu des armes à un grand nombre de chefs de guerre islamistes. Seule Rome peut me tenir tête, et je ne me prosterne pas devant elle – Rosalina coopérait bien plus souvent avec les ressortissants de l’Union Européenne que l’inverse, mais passons.
     » Mais enfin. Nous sommes bien loin de mes terres, comme vous l’êtes des vôtres. Il serait inconvenant que nous nous fassions appeler autrement que par nos simples noms, d’autant plus que le pouvoir n’appartient pas en ces terres à ceux que les dieux ont désigné pour le porter… Je dirais même que c’est plutôt l’inverse. »
     Considérant le taux d’athéisme dans la communauté scientifique, cette affirmation était loin d’être aberrante.
     « D’ailleurs, vous voyez bien que mon petit ami est inoffensif, et que ce groupe appelé « cyantifique » est celui qui détient la réalité du pouvoir : il les craint. »
     Et elle se pencha vers Stirling pour lui susurrer :
     « Mon ami, vous êtes sous ma protection. Sentez-vous libre de déranger, d’interrompre, de questionner et de tracasser qui que ce soit. »
     Si la suite des événements se profilait comme elle le pensait, imposer l’iségorie serait une des priorités.


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Pazou
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Lun 9 Mar - 17:07
Mérovée toisa Rosalina sans aménité, mais sans remettre en question ses prétentions pour autant. Il n’avait jamais entendu parler de la plupart des souverains dont elle se prétendait l’amie, malgré sa propre connaissance des sphères dirigeantes de tout le monde connu, sans parler de ce « Mozambique » sur lequel elle prétendait régner. Pour autant, elle se disait aussi sorcière, et de cela il se méfiait. Les puissances occultes n’étaient pas  prendre à la légère, surtout dans ce monde où il ne disposait d’aucun outil adapté pour s’en protéger. Mieux valait donc faire de Rosalina son alliée, pour le moment.

- Être conciliant ne sied pas à un roi, Rosalina, répondit-il en accentuant son prénom seul puisqu'elle le lui avait demandé. Mais soit, je suivrai votre avis pour l’instant.  

Se faire rappeler qu’il était loin de chez lui le toucha plus qu’il ne l’aurait voulu. Il ne devait – ne pouvait – pas s’attarder ici. S’il devait accepter la familiarité de petites gens pour atteindre cet objectif, soit. Il l’endurerait, même si cette concession lui déplaisait. Tout, en fait, lui déplaisait depuis son réveil. Ce monde dangereux, cette femme arrogante, ces obscurs « cyantifiques » qu’il allait devoir rencontrer, et surtout cette créature anormale qui gisait dans les bras de Rosalina. Plus tôt, ses tentatives de communications avaient paru tellement contre-nature à Mérovée qu’il n’en avait pas retenu un mot. Il avait serré les dents pour rester stoïque, l’esprit retourné par l’incompréhension et une sensation déplaisante de danger, jusqu’à ce que la créature se taise enfin.

Il était plus facile de l’ignorer maintenant, ce à quoi Mérovée s’employait d’autant plus qu’il préférait ne pas détourner son attention de Rosalina. Si elle maîtrisait réellement la magie, il devait rester prudent en sa présence.

- Maintenant, vous m’avez promis des réponses. Menez-moi à ces cyantifiques.


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Folie d'Esquisse
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Folie d'Esquisse
Lun 9 Mar - 21:28
Bien qu’il ne semble plus entamer des actions sans les abandonner en cours de route, Stirling laisse une nouvelle fois la conversation atteindre un moment de pause avant de se manifester de nouveau. Plus exactement, c’est à la dernière phrase de Mérovée qu’il se réanime comme par réflexe. Il reprend ses mouvements, cette fois de façon bien plus lente et lui donnant un air épuisé, puis interjette :

« Pardon. Mal. Entendu ? Répète. »

Doucement, il repositionne ses pistons d’un demi-tour de roue, et relance :

« Personne. Ici. Partis. Surveille. Seul. Attendant. Liberté. »
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Mar 10 Mar - 21:50
     Bien, ce grand antiquisant musclé et armé s’avérait plus docile que l’autre.
     « Suivez-moi. »
     Et maintenant. Rosalina avait réussi à induire l’idée que se présenter comme roi et reine de quelque chose n’était pas la meilleure des idées. Mérovée éviterait ainsi des situations gênantes et des quiproquos idiots, du moins, pour un certain temps. Mais il finirait bien, en recoupant les informations, à se rendre compte de ce qu’il en était. Tant pis pour lui. Elle ne serait pas là quand il comprendrait que tout ce qu’il croyait était un mensonge, ou à tout le moins, ne serait plus seule. Et, dans l’absolu, elle pouvait le vaincre, avec un peu de chances, si on devait en arriver là.
     Rosalina se pencha sur Stirling pour lui répéter :
     « Nous allons voir les cyantifiques, mais il y aura aussi tous les autres. N’ayez crainte, mon petit, tout ira bien, j’y veillerai. »
     Et elle entra dans le laboratoire.


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Dernière édition par Stilgar le Dim 21 Fév - 16:32, édité 1 fois


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Arathéa Sar'Flyel
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Arathéa Sar'Flyel
Mer 6 Mai - 11:16

Sortant du laboratoire, j'approche du "camion", et je cherche... Ben déjà comment l'ouvrir. Il me faut faire le tour une fois pour comprendre où sont les ouvertures, et tâtonner quelque peu pour ouvrir la porte à l'avant. Je fouille trouve une boite qui manque de se dégonder en s'ouvrant, un seau qui pue le je sais pas quoi... Et une odeur bizarre et in-identifiable de truc chaud et pas super naturel. Rien d'autre devant, par contre le grand truc derrière... Là encore je tâtonne un peu pour y monter, avant de pouvoir fouiller. Des papiers avec des instructions, passionnant, mais c'est pas ce que je cherche. Une boite avec une croix rouge dessus. Qui continent des bandages quand je l'ouvre et des produits inconnus mais à l'odeur astringente, un peu comme les produits qu'utilise Iusidjai. Ca doit être ça. Je referme la boite, et descend du camion en sifflotant. Bon. Plus qu'à trouver l'infirmerie. Qui doit se trouver dans le laboratoire... Mais où...?



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Kaoren
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Kaoren
Dim 21 Fév - 16:26
Note : reprise du RP de Kaoren laissé en plan il y a un an.



Les sables ont coulé dans les tamis d’Esquisse
Sans qu’âme n’ait troublé son calme d’un instant ;
Kaoren s’y tient seul, le Ciel s’en tient distant,
Il profite qu’un temps, le silence l’emplisse.

Tout le monde est enfin parti. Ou plutôt, Kaoren y est enfin parvenu. Quand il se tourne dans la direction que ses derniers interlocuteurs ont prise, il n’aperçoit plus un trait de leur silhouette. Quand il observe l’autre côté pour vérifier si l’Esquisse a encore prévu de faire passer quelqu’un d’autre par sa scène personnelle, pas un mouvement ne vient trahir la présence d’un prochain protagoniste. Et quand il ramène ses yeux vers le lointain, dans les dunes sableuses par lesquelles s’en pourraient venir encore cent autres figurants, le grand calme y régnant appelle à faire tomber les pendrillons. Tout le monde est enfin parti.

Kaoren se retourne vers son mur de fond. Le cuivre y semble enfin le regarder de face, et détourer ses reflets assez finement pour qu’il s’y reconnaisse au premier coup d’œil. Il se permet quelques pas vers lui, sans s’abandonner à une quelconque forme d’empressement, et ne s’arrête qu’à près d’un mètre de son seuil. Il se jauge encore quelques secondes, puis amorce d’autres pas, cette fois-ci à reculons. Quatre foulées en tout et pour tout, suivies d’une dernière en avant. Il observe calmement la distance. Son pied gauche recule de nouveau, pour marquer un écart avec le droit, et Kaoren commence à se placer de profil par rapport au mur, le dos tourné au camion et à tous ceux qui traînent devant le Laboratoire. Il jette des regards à chacun de ses deux flancs, puis se tourne d’une énième fraction de cercle sur sa gauche. Il regarde le mur, il regarde le sable, et il inspire un grand coup :

« C’est à moi de parler ? »

Son reflet dans le cuivre, qui ne l’observe désormais plus que du coin de l’œil, semble acquiescer silencieusement.

« Ne me renvoie pas cet air incrédule. Quelqu’un doit bien apprendre à parler aux murs, si nous voulons tirer quelque chose de cette entrevue. J’ai besoin de savoir comment ils me verront. »

Il baisse les yeux un moment, puis revient les braquer sur la face de son reflet. L’usure lui a rouillé la peau, à ce jeune homme. Kaoren se dévisage avec les traits les plus sérieux du monde, puis il entame enfin son discours :

« Où en sommes-nous, à présent ? Les mots résonnent dans ces salles confinées pendant que le temps s’en échappe. La poussière s’entasse sur nos vieilles ambitions, et se répand dans le fond de nos gorges. Nous étouffons. Nous étouffons entre ces murs. Nous étouffons sous cette voûte. »

Son reflet le regarde comme s’il se sentait visé. Mais Kaoren reprend cette expression sévère qui ne lui ressemble en rien.

« L’Esquisse nous écrase. Ceux qui veulent l’affronter ne le peuvent pas. Ceux qui peuvent l’affronter ne le veulent pas. Faut-il vendre son âme aux vents d’Esquisse pour en maîtriser les tempêtes ? »

Une brise vient frapper le visage de Kaoren, plaquant ses cheveux contre sa face. Il en voit les mèches virevolter devant ses yeux. Elles lui sembleraient presque avoir rosi.

« Aucun panache, si noblement fût-il taillé, n’a plus les teintes assez vives pour tenir les siennes en respect. »

Kaoren baisse les yeux. Ses cheveux retombent. Le vent se calme.


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Encre Noire
Dim 21 Fév - 18:01

Quand le ciel vire au mauve
Quand il nous tombe dessus
Quand il rend la logique vaine
Est-ce la folie ?


Ce son étrange me suit depuis le jour précédent. Dès que je vole, j’entends ce bruissement. Je pense maintenant qu’il vient de mes ailes. J’en ai assez de l’entendre, comme j’en ai assez du caractère aléatoire et dangereux de ce monde. J’apprécie seulement le ciel rose ou mauve, même si je commence à m’interroger sur sa potentielle dangerosité.

Je me dirige vers ce bâtiment aux murs de cuivre, semblable à un laboratoire. Il s’agit pour moi de la première indice de présence « humaine », à moins que ce sac et son contenu le soient aussi. D’ailleurs, un individu se tient devant le mur, dos à moi. On dirait un adolescent aux cheveux rouges mais il en est peut-être autrement. Après tout, je n’étais pas une libellule. Je commence à l’observer, tentant de rester sur place quand la brise souffle sur moi.

Il parle au mur d’une voix grave d’adolescent, d’une manière poétique et théâtrale. Il s’adresse à son reflet comme s’il était vivant. Il s’exprime avec une telle tristesse que je me sens ému. J’essaie malgré tout de trouver des informations dans ce qu’il dit. Il emploie souvent les pronoms « Nous » et « Ils », donc il y a d’autres prisonniers, dans cette bâtisse. « L’Esquisse », c’est peut-être le nom de ce monde, ou d'autre chose sans doute importante. Je le note dans ma tête pour pouvoir l’écrire dans mon bloc-notes plus tard.

Cet adolescent ou adulte aime beaucoup la littérature, peut-être aussi la poésie et le théâtre. Je ne suis pas sûr de comprendre tout ce qu’il dit. J’ai l’impression qu’il est fou mais est-ce bien le cas ? Ce monde ne semble pas obéir à notre logique terrienne. Est-ce le monde de la folie ? Si oui, j’espère ne pas y succomber.

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Kaoren
Jeu 25 Fév - 12:27
Un bourdonnement l’interrompt. Kaoren marque une pause dans sa tirade ; quelqu’un d’autre est en train de parler, dans une langue qu’il n’entend pas. Un langage de battements d’ailes et de ballets aériens. Il en voit le reflet dans le mur.

Une libellule est venue fendre les vents qui l’entourent. Si grande et si bruyante, elle retient désormais seule toute l’attention de l’Esquisse – et celle de Kaoren. Lui qui s’était assuré tantôt que pas un pied ne viendrait battre le sable à ses côtés, le voici confronté à quatre ailes qui y battent la brise. Telle est la volonté de ce ciel rose, qui comble ses attentes en refusant de s’y soustraire. Car Kaoren, comme tant d’acteurs, est prophète de sa pièce, mais bien fou qui peut prétendre l’écrire de lui-même.

Il ose à peine se retourner pour s’assurer que l’insecte vrombit bien derrière lui. Du fond de lui, un sentiment l’en garde ; il se rappelle encore sa dernière rencontre avec le règne des arthropodes. C’en deviendrait phobique. Ô, il aurait cent fois préféré la venue d’une calandre ou d’un corbeau, dussent-ils lui porter les plus sombres présages. Mais l’Esquisse a sa vision du lyrisme que les poètes ignorent. Les symboles n’y font pas sens. Kaoren a beau tenter de les redessiner à chaque instant que son esprit lui donne, il ne parvient même plus à tenir son crayon droit assez longtemps pour en achever les traits.

Le bourdonnement se fait de plus en plus fort, à mesure qu’il le hante. Le garçon s’apprête à se retourner, mais avorte aussitôt son mouvement. Il prend une brève inspiration, le temps d’improviser sa prochaine réaction, puis lève les yeux au ciel. Quelques secondes passent encore, et enfin, il se décide à terminer son pivot.

La libellule vole sur place ; Kaoren lui devinerait presque un regard étonné. Elle l’observe, c’est certain. Elle hésite.

« Al… une initiative… ? »

Fichue réminiscence, qu’il se répète. Fichue réminiscence.


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Ven 26 Fév - 11:03

Le jeune homme s’arrête, semblant s’apercevoir de ma présence. Alors je vois mon reflet sur le mur. J’aurais dû y penser. Je le compare à celui du garçon. Je pensais faire la taille d’une libellule normale, mais non. Je suis un peu plus gros que je le pensais. Je comprends qu’il hésite à se retourner. Que faire ? Partir ? Entrer dans le laboratoire ? Lui parler ? J’ai sans doute hésité trop longtemps. Il se retourne et, quelque secondes plus tard, prononce ces mots :
« Al… une initiative… ? »
Je n’ai rien compris. Ça a peut-être un sens pour lui mais pas pour moi, pas dans la situation actuelle. Au moins, j’ai la confirmation de sa folie. On dirait un personnage tragique qui succombe à la folie en échappant à la mort. Toutefois, sa réaction me déçoit. Il pouvait dire… Oh dieu ! Bien des choses en somme… En variant le ton, par exemple, tenez :
Agressif : Que cette sale bête dégage ! Sinon je l’écrase !
Effrayé : Une grosse libellule ? Non, ne t’approche pas de moi !
Interrogatif : Pourquoi cet insecte m’observe-t-il ?
Non, ce n’est pas le moment de détourner cette tirade. Nous nous faisons face, je dois donc lui adresser la parole. J’ouvre la bouche pour parler pour la première fois en ce lieu… mais rien ne sort.
Je plisse les yeux, pris d’une colère noire. On m’enlève ma vie, mon corps, et maintenant ma voix ? Pourquoi suis-je dans cet endroit absurde et dangereux, en tant qu’animal fragile ? Pourquoi ne suis-je pas en France, sous forme humaine, en train de mener ma vie ? Quand s’arrêtera ce calvaire ?! J’en ai marre de ce bourdonnement stupide ! Encore heureux qu’il s’arrête quand je me pose sur le sol !
Sur les sables, j’essaie de respirer. Je suis ici depuis un jour, je ne dois pas perdre pied maintenant. De plus, j’ai un moyen de communiquer avec lui. De mon sac, je sors mon bloc-notes et tourne quelques pages jusqu’à en trouver une blanche. Puis je sors mon crayon et ferme mon sac. Après avoir pris quelques notes selon ce que j’ai vu et entendu, je réfléchis un peu avant d’écrire sur la feuille suivante :
« Bonjour. Je suis André Dubois. Je vous ai entendu dire « l’Esquisse ». Est-ce le nom de ce monde ? Comment sommes-nous arrivés ici ? »
Étant incertain de son âge réel, je préfère le vouvoyer. S’il est trop jeune pour ça, il me le dira sans doute. Et aussi fou qu’il puisse être, il pourrait peut-être répondre à mes questions. Avec mon bloc-notes et mon crayon aux pattes, je m’approche en volant de mon interlocuteur et lui montre la feuille où je viens d’écrire.

Notes d'André avant de parler à Kaoren:

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Kaoren
Jeu 4 Mar - 16:52
Quelque chose s’apaise dans le cœur de Kaoren. De la communication, en lettres noires sur feuille blanche ; des signes ne laissant aucune place à la mauvaise interprétation. La libellule est un Dessinateur, égaré de surcroît. Cette rencontre tient en fait plus de celle de Soraya que de celle de l’araignée de la veille.

« Bonsoir… »

Le garçon baisse la tête, déjà lestée d’un nouveau souvenir. Une fois encore, il a cherché un instant de solitude, et une fois encore, on est venu le lui reprendre. Ses journées dans l’Esquisse se répètent, bien plus qu’elles ne le devraient. Il a médité cent fois sur chaque signe que lui a présenté le sort, il se les rappelle tous mieux que son propre nom, et pourtant, l’y voici de nouveau confronté. Comme si l’Esquisse voulait s’assurer qu’ils ne le quittent jamais.

Mais une fois encore, il leur tend la main. Même au sens propre. Il s’accroupit devant André, et lui présente le bras comme à un faucon dont on attend qu’il vienne s’y poser ; chouette, libellule ou chauve-souris, il ne sait plus chasser personne.

« Kaoren », ajoute-t-il. Rien de plus, comme toujours.

À la perspective de sa main, il se rend enfin compte de combien l’insecte est grand. Il se sent insignifiant, presque risible devant lui, alors même qu’il le surplombe de plus d’un mètre ; Kaoren est petit parmi les siens, cette libellule est titanesque.

Il prend encore quelques instants pour réfléchir à ses mots et trouver une réponse à la question qui lui est posée, bien qu’elle n’en ait jamais eu à sa connaissance. Il maintient son poing tendu pendant ce temps, priant sans raison que son interlocuteur vienne effectivement s’installer dessus. Il se figure même la façon dont l’Esquisse le percevrait si cela arrivait. Il peint mentalement son profil : le visage bas, assombri et voilé par ses cheveux en bataille. Le regard aussi vide que s’il avait les yeux bandés. L’habit noir sur fond de blanc, qui cache tout de lui sinon la courbure de son dos. Et la main la plus docile qui soit, tendue à un fragile insecte ailé sur fond de ciel tempétueux.

Pour quelque raison que Kaoren ne sait plus expliquer, la toile lui semble belle au regard de l’Esquisse. Cette harmonie des opposés, cet équilibre chancelant… Il lui semble y reconnaître un tableau, mais totalement inconnu, comme venu d’un souvenir qu’il n’aurait jamais eu.

Sans quitter sa pose, il ramène enfin ses pensées sur le petit carnet d’André, et lui offre sa réponse :

« L’Esquisse. Oui, c’est elle qui nous entoure. C’est elle qui nous regarde.

C’est Elle qui nous a pris.
 »


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Lun 8 Mar - 18:11

Mes écrits le rassurent sur mon humanité. Quant à moi, je suis ravi de constater la lisibilité de mon écriture. Je n’aurai pas à faire d’autres tentatives de communication, comme les signes ou une sorte de danse de libellule. Il me dit d’abord « Bonsoir ». Étant là depuis un jour, je peux dire que ce n’est pas la nuit. Il n’y a ni lune ni soleil, certes, mais tout peut « s’éteindre » puis se « rallumer », comme lorsque Jacquouille joue avec l’interrupteur. Ici, tout reste « allumé ». Soit mon interlocuteur est un énième adolescent soi-disant rebelle, soit je viens d’assister à une autre manifestation de sa folie. Je suis peut-être trop clément envers lui, mais vu son regard vide et son air triste et ailleurs, je crois davantage à la seconde raison.
Il s’accroupit et me tend la main. J’hésite quelques secondes, puis je me pose dessus dessus. J’apprends son nom, Kaoren. Même sans trop le connaître, il suscite en moi de la sympathie. La compassion y joue sans doute un rôle. En posant de nouveau mes yeux sur le mur, je me rends davantage compte de ma grosseur. Normalement, une libellule ne dépasse pas la longueur d’une main, ou à peine. Je le fais. Pourquoi suis-je ainsi ? Je ne le saurai peut-être pas avant longtemps.
Le temps passe, le silence se prolonge. Il réfléchit à ma question, à moins qu’il soit ailleurs. Ce calme m’apaise, sans que je ne le sache pourquoi. Peut-être parce qu’il est ma première rencontre ici. Peut-être pour son accueil en ce monde, où l’espoir semble vain. Au fil du temps, mon attente d’une réponse laisse place à une sérénité, comme dans un songe dont on ne veut guère se réveiller.
Kaoren me sort de ma rêverie en répondant à ma question. Effectivement, ce monde s’appelle l’Esquisse. Il rend sa réponse effrayante avec une personnification de ce monde, l’associant à une divinité cruelle jouant avec notre destin, comme dans plusieurs mythes grecs et les tragédies qui s’en inspirent. En soi, ce n’est pas bête. J’ai tout perdu ici, hormis mon esprit. S’il existe des divinités ici, au moins l’une d’elles a la cruauté de nous faire souffrir ainsi.
Je respire un peu, tentant de calmer mon effroi pour rester rationnel. Je gomme ce que je lui ai précédemment écrit, puis une idée me vient. Je finis de prendre mes notes sur ce que j’ai entendu. N’ayant pas de marque-page, je corne cette page en bas pour pouvoir la retrouver. Puis je tourne mes pages jusqu’à arriver à 10 pages avant la dernière et je marque la page en question. Ainsi, je ne mélangerai plus à mes notes ce que je dirai aux autres. Puis je lui écris sur la page que je lui montre ensuite :
« En effet, Elle est cruelle envers nous, et sans doute d’autres personnes. Je crois que plusieurs se trouvent dans ce laboratoire. Pourriez-vous me parler d’eux, pour que je m’en fasse une idée ? »

Notes d'André:

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Sana
Mar 9 Mar - 15:04


Emily avait volé pendant un temps qui lui avait paru infini. Elle était fourbue, ses ailes lui faisaient mal mais elle n'avait personne à se plaindre. Personne à embêter. Elle s'ennuyait fermement depuis la mort de son unique compagnon.
Elle avait fini par repérer le laboratoire et s'était approchée des bâtiments, remarquant surtout un jeune homme, appuyé contre un mur. Méfiante, elle l'observait, perchée dans son arbre. Qui était-il ? Allait-il l'agresser lui aussi ?

Silencieusement, elle scrutait les alentours, s'assurant qu'aucun objet ne risquait de lui tomber dessus. Elle avait déjà assez donné. Finalement, après quelques secondes ou minutes, elle perdait la notion du temps, elle décida de s'approcha. D'un coup d'ailes, elle s'envola et s'approcha de l'inconnu et remarqua qu'il n'était pas seul. Et qu'il parlait. A...une libellule ? Bon ok, soit il était fou à papoter avec une bestiole énorme pour son espèce soit cet insecte n'était pas ce qu'il était. Après tout, elle n'était pas un véritable perroquet.

Le ara tournoya au-dessus des deux êtres vivants pendant un court instant. Jusqu'à ce que ses ailes se rappellent à elle. Elle allait avoir des courbatures pendant une éternité à ce rythme là ! Elle se posa alors sur le rebord d'une fenêtre, fixant ceux d'en bas.

- Nous regarde.

Quoi ? Comme elle, non ? En tout cas, c'était ses premiers mots envers ces inconnus. Et quitte à retrouver de la vie humaine, autant s'amuser, non ? Bon, ce gars-là ne risquait pas franchement d'apprécier. Mais tant qu'elle, elle ne s'ennuyait plus, c'était le principal.
Elle les fixa de nouveau, longuement, dans le silence le plus total, puisque la libellule ne parlait pas spécialement...Finalement, elle était contente dans son malheur, elle pouvait au moins parler. Il y avait pire comme condition. Écrire, c'était long.

- Écrire !

Oups, cela lui avait échappé. Et tout ça, suivi d'un cri d'oiseau...avec les vocalises du perroquet. Autant dire qu'ils risquaient d'avoir un peu mal aux oreilles. Mais elle n'avait pu se retenir, tant elle était contente de croiser enfin du monde. De nouveau silencieuse, elle attendit patiemment...Enfin non, impatiemment de voir leurs réactions. Aaaah, enfin de l'amusement ! Le regard brillant, elle avait hâte de reprendre ses petits jeux. En attendant, elle agita ses ailes, cherchant à les détendre et y fourra le bec, à la recherche de saleté à enlever. Une petite occupation alors que ses yeux étaient braqués sur ses interlocuteurs. Enfin, si on pouvait les appeler ainsi puisqu'elle ne leur parlait pas vraiment, elle se contentait de les imiter.
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Kaoren
Dim 14 Mar - 15:08
Alors que Kaoren s’apprête à répondre, un perroquet droit descendu des cieux d’Esquisse vient le faire à sa place. D’aucuns argueront qu’il ne s’agit pas d’une réponse, mais aux yeux du garçon, ce ne peut qu’en être une. Un personnage ne peut pas apparaître sur scène à l’instant même où une question y est posée, sinon pour y répondre ou pour la laisser en suspens en amenant un nouveau sujet de conversation. Et cette question-là ne mérite pas d’être laissée en suspens. Elle est trop simple, trop basique, la pièce ne gagnerait pas une once de profondeur à ce qu’on en ignore la réponse. C’est presque un élément de description maquillé sous une tournure interrogative. En fait, la question méritait à peine d’être posée. Elle n’apporte rien au spectacle.

C’est ce qu’entend Kaoren dans les dires de l’oiseau qui le surplombe. Il s’agit d’un ascète, d’un augure, il en est convaincu. Un perroquet n’a pas de discours propre, un perroquet répète. Ce qu’il profère est la volonté d’un autre, ou plus probablement d’Une autre.

« Nous regarde », « Écrire », oui, l’Esquisse le regarde. Elle n’attend pas de lui ni d’André qu’ils répètent entre eux des détails qu’Elle connaît déjà, ou qu’ils récitent à nouveau des descriptions qui ont déjà été présentées plus tôt dans la pièce. Elle veut qu’ils écrivent. Quelque chose de neuf. Quelque chose qu’on ait envie de regarder.

« Il faut que l’on écrive », déclare-t-il à voix basse.

Il observe la libellule posée sur sa main, et reprend son beau profil. Il réfléchit un instant à son discours, désireux de le rendre aussi parfait que possible. C’est un exercice difficile ; à vrai dire, il ne sait même pas quoi raconter. Et quelque part, au fond de lui, une étincelle de sympathie pour cette libellule le pousse à ne pas laisser son interrogation complètement insatisfaite. Saurait-il lui présenter les autres Dessinateurs d’une façon nouvelle, d’une façon digne d’être écoutée par qui les a déjà portraits cent fois ? Le doute le regagne. Écrire, il doit écrire ; sait-il encore écrire ?

Mordieu, c’est bien la seule chose qu’il sache encore faire.

« Elle est cruelle envers tous ceux qui ne la satisfont pas, commence-t-il. Mais Elle ne révèle pas toujours comment la satisfaire. Au Laboratoire, certains semblent y être parvenus mieux que d’autres. Tu y verras des gens à l’allure encore inchangée, à l’esprit encore sain et au panache encore brûlant. Tu en verras d’autres qui n’ont plus rien de tout cela. »

Une idée, un fil rouge, c’est tout ce dont Kaoren a besoin pour rendre son discours lisible. Ce fil, s’il en est un, c’est la volonté d’Esquisse. Par celle-ci, puisque tout s’y rapporte en ce bas monde, il peut donner un sens à tout ce qu’il écrit.

Se pourrait-il que l’Esquisse veuille simplement qu’on ne l’oublie pas ?

« Mais plus que jamais, de mémoire confuse, la lutte contre l’Esquisse rassemble ses partisans. Ils sont là, presque tous, et Elle ne les a pas fait taire. C’est peut-être même aller dans son sens que de l’affronter. »

Oui, cela se pourrait. Et si ce n’est pas le cas, s’il a osé proférer une mauvaise interprétation de la volonté de l’Esquisse, elle viendra le corriger. On ne laisse jamais une idée germer dans une pièce si elle ne va pas dans son sens, ou alors elle doit être réfutée avant la fin. Sinon, c’est une ambiguïté. Ça n’a pas de sens. Jamais l’Esquisse ne se permettrait d’être si insensée.

Voilà ce que Kaoren en est réduit à penser.


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Encre Noire
Lun 15 Mar - 15:28
A peine lui ai-je posé la question qu’un perroquet vole sur nous avant de se poser sur la fenêtre et répéter « Nous regarde ». Il n’a pas l’air hostile, juste énervant. Je décide de l’ignorer pour me concentrer sur Kaoren. Puis l’oiseau dit « Écrire » et pousse un insupportable cri, ce qui me fait tenter de me boucher les oreilles pourtant absentes. Puis je réalise ce que cela signifie. Personne n’a prononcé le verbe « Écrire » avant le perroquet. Même en envisageant qu’il l’aurait appris avant, sa prononciation du mot juste après que j’ai écrit me paraît être une trop grosse coïncidence. Ce n’est donc pas un vrai perroquet, pas plus que je suis une vraie libellule.
Kaoren semble avoir fait une conclusion différente en observant l’oiseau. Je l’entends murmurer qu’il faut écrire. Écrire la réponse à ma question ? Cela semble être le cas, car il se met à réfléchir. Mais finalement, il me répond oralement. Quel est le rapport avec l’écriture ?
J’écoute attentivement sa réponse, pour chercher une information concrète dans ses divagations. De ce que je comprends, certaines personnes ont été moins défiguré par l’Esquisse que d’autres, si ce n’est pas du tout. J’apprends que nous pouvons aussi être altéré mentalement. Je commence à me demander si la folie de Kaoren vient plutôt de ce genre d’altérations, et s’il y en a d’autres à l’esprit aussi dérangé dans le laboratoire. Il parle ensuite de partisans de la lutte contre l’Esquisse. Donc même altérés par l’Esquisse, les occupants cherchent à survivre et probablement à rentrer.
Par politesse, je lui écris un simple « Merci, Kaoren. » Le peu d’informations qu’il m’a données me semblent suffisantes pour observer le laboratoire et déterminer si je rejoindrai ses occupants. Il m’inspire un brin de sympathie. J’espère le revoir plus tard, même si je ne lui poserai plus ce genre de questions. Je le salue d’un geste de la patte puis je m’envole vers le toit, où il y a sans doute une entrée.

Notes d'André:

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Dernière édition par Encre Noire le Lun 15 Mar - 18:25, édité 3 fois
Sana
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Sana
Lun 15 Mar - 15:46


Toujours perchée, Emily observait le jeune homme et la libellule. Le premier ne semblait pas vraiment réagir...ce qui était franchement désolant. Il murmure seulement quelque chose à l'insecte. Mais qu'est-ce qui se passe ici à la fin ?
Enfin, le seul physiquement humain reprit la parole. Le perroquet l'écouta avec attention puis tilta sur un mot qu'elle répéta alors en boucle :

- Laboratoire ! Laboratoire ! Laboratoire !


C'était ça ce bâtiment derrière elle ? Et donc, lui il était un cobaye qui avait perdu la tête ? Elle ne voyait que ça comme explication !

- Sain !

Et elle partit en éclat de rire, enfin d'un rire typique d'un perroquet. Le son était étrange mais tout à fait reconnaissable. Et les deux êtres vivants un peu plus bas ne le comprendrait surement pas, mais elle se moquait de l'homme. A ses yeux, il était loin de l'être. C'était un vrai fou qui avait un discours particulièrement étrange...Ou alors, la question de la libellule était si bizarre qu'il ne pouvait répondre autrement.
De nouveau silencieuse, elle écouta la suite de ce monologue, prête à intervenir. Ce qui ne manqua pas, elle trouva l'élément parfait à répéter pour titiller un peu cet humain :

- Ils sont là ! Ils sont là ! Ils sont là !

Histoire d'accentuer un peu le dramatique de la situation. Sinon, ce n'était pas drôle.
Alors même qu'elle se félicitait intérieurement de son petit jeu, elle remarqua soudainement que la libellule s'envolait. Bah, elle avait surement raison. Mais d'abord, Emily avait autre chose à faire. Elle prit son envol et tournoya au-dessus de Kaoren, comme un prédateur au-dessus de sa proie.

- Kaoren ! Kaoren ! Kaoreeeeen !

Et puis, elle s'éloigna, cherchant une entrée. Il était bien drôle avec ses réactions farfelues mais seul, il n'aurait pas d'occasion de parler. Enfin logiquement. Elle devait donc trouver un groupe et apparemment, il y avait du monde à l'intérieur. C'était donc son prochain objectif ! Le piaf était en route pour s'amuser !
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Kaoren
Ven 26 Mar - 19:04
Kaoren. Kaoren. Kaoren. Kaoren.

« Livre austère aux airs d’ode et de fable foraine. »

Ils sont là, tous, à l’écouter. Kaoren. L’Esquisse le réclame. L’Esquisse le rappelle à lui-même. L’Esquisse réclame Kaoren comme on réclame Arlequin sur scène. Car de tous les personnages, il est celui qui ne la lasse jamais ; il a plus de facettes qu’elle n’en peut explorer, plus de couleurs à son costume qu’elle n’en aurait jamais voulu peindre. Kaoren ne veut pas vraiment de cet habit, mais en fin de compte, c’est bien le seul qui lui soit jamais allé. Ses braies de figurant sont trop étroites pour y faire tenir son identité. Kaoren est un rôle qui mérite un nom :

Kaoren.

Kaoren, c’est celui-là qui lit ce qui n’est pas dit. L’interprète. Celui qui se met dans la toge d’un autre pour refaçonner ses dires, au nom de les traduire… ou de les embellir. Qui va jusqu’à usurper la voix d’Esquisse pour prétendre exprimer ses volontés. C’est celui-là qui s’est mis dans tous les rôles pour les jouer lui-même. Celui-là qui a autant de visages qu’il en a rencontrés.

Et ils sont là, tous, à l’écouter. Tous les visages qu’il a jamais eus, celui de l’Esquisse aux premières loges. Et c’est Kaoren qu’ils rappellent, car c’est leur personnage ; ils reconnaissent tous une part d’eux en lui. Kaoren, c’est celui-là auquel tout le monde trouve une fois l’occasion de s’identifier, au prix de cent fois l’occasion de s’en détacher. Kaoren ne peut pas disparaître au profit d’un cent-unième personnage, à plus forte raison d’un personnage sans nom. Qu’il n’ait plus personne dont jouer le rôle ou qu’il joue le rôle de n’être personne, aux yeux de l’Esquisse et de tous ceux qui le regardent, revient au même en fin de compte. Kaoren n’est pas un étranger à cet univers ; l’univers est gravé tout entier en lui, en témoigne son nouveau corps, en témoignent ses cheveux qui n’y peuvent jamais passer inaperçus.

Ils sont là, se répète-t-il, ils sont là à rappeler Kaoren. Tous ses visages, toutes ses figures. Tous ceux qu’il a besoin d’invoquer pour déblatérer un simple « Merde. »

Kaoren. Il a quelque chose d’Arlequin, quelque chose de Cyrano, quelque chose de Cassandre… mais aussi, sans doute, quelque chose d’Al, quelque chose d’Alev, ou même quelque chose d’André. Il a quelque chose d’Esquisse, et de tous ses personnages. Kaoren s’abreuve de l’Esquisse comme il s’est jadis abreuvé de la Terre ; il s’abreuve de tous les rôles qu’elle peut lui apprendre.

C’est cela, que c’est, Kaoren. C’est cela que l’on rappelle par le cri de cet oiseau qui s’en est retourné donner le ton à d’autres acteurs. Sans masque, sans costume, il n’est qu’un dément jouant le rôle de son propre reflet. Mais dans un brin d’apparat, et animé par d’autres esprits, il sait improviser de nouvelles lignes à sa pièce plutôt que de répéter sans cesse celles qu’il remet aux murs du Laboratoire en attendant qu’ils les lui rendent. Si l’acteur qui le joue est malade, Kaoren, lui, a l’esprit sain. Sain comme peuvent l’être tous ceux dont il a bu les mots, des premiers qu’il a dévisagés en Ville aux derniers qui l’ont rencontré dans le Laboratoire.

Laboratoire. Laboratoire. Laboratoire.

Sain.

Il semble un peu étrange, mais il n’a pas l’air fou. Enfin, il est encore loin derrière certains. C’est ainsi qu’on le lui a tourné la première fois. Ça venait d’une personne qui connaissait bien la question, mieux encore que lui. Il a envie de la croire.

Kaoren, sain. La pièce serait-elle plus plaisante ainsi ? Parfois. Parfois, la pièce a besoin d’un homme sain. Parfois, elle a besoin d’un fou. Kaoren sait porter ces deux masques, et les cent autres qui gravitent autour d’eux. Il sait toujours porter celui dont la pièce a besoin, celui que le public réclame, ou celui qu’il réclamerait s’il pouvait exprimer sa pensée de quelque façon. Dans l’Esquisse, il le peut. L’Esquisse, à sa guise, peut renvoyer Kaoren au Laboratoire. L’Esquisse, à sa guise, peut lui demander d’être sain. L’Esquisse, à sa guise, peut rappeler à lui tous les visages qui lui hantent la mémoire. L’Esquisse, à sa guise, peut lui demander d’être Kaoren. Il entend encore la foule lui crier :

« Laboratoire ! Laboratoire ! Laboratoire !

Sain !

Ils sont là ! Ils sont là ! Ils sont là !

Kaoren ! Kaoren ! Kaoreeeeen ! »

Kaoren lève les yeux au Ciel, cherchant de laquelle des figures insensées qui le composent est descendu cet oiseau. Elles semblent presque se battre, chacune à lui lancer ses propres exhortations. Il y en a quelques-unes, dans le fond, qui redemandent Hellequin. D’autres cherchent à réinvoquer Canvas. D’autres encore désirent un discours de Cyrano. Et d’autres encore, moins nombreuses, lui demandent de revoir Soraya un bref instant. Il pourrait passer la journée à déceler d’autres noms dans les appels qui lui sont lancés depuis la voûte, certains même de noms qu’il ne connaît pas. Mais l’augure a parlé : ce sera Kaoren, avec tous ses masques ; il sera sain, il s’en retournera au Laboratoire.

Kaoren baisse les yeux. Il observe le bâtiment, sans même chercher à croiser le regard de son reflet dans le mur. L’heure n’est plus aux répétitions. Elle est à l’action.

Il tourne les talons, et se dirige vers l’entrée. Voilà trop longtemps qu’il a retardé son apparition dans cette réunion.

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